[Ex-entraineur] Guy Roux

L’arrivée du mythique entraîneur de l’AJA - officiellement à la retraite depuis deux ans - a rassuré les supporters sur l’ambition du club mais aussi soulevé pas mal d’interrogations.

Comment s’est conclue l’arrivée de Guy Roux ?
Au début des années 80, André Delelis, ancien maire de Lens, avait invité Guy Roux à déjeuner afin de lui demander de diriger les Sang et Or. Sous contrat à l’AJ Auxerre, le natif de Colmar avait décliné la proposition. Cette fois, il n’a pu que répondre par l’affirmative à l’appel de Gervais Martel, qui a encore surpris tout son monde en faisant sortir de sa retraite le légendaire entraîneur au bonnet. Roux n’attendait que cela, il trépignait à Auxerre où il s’était à de nombreuses reprises ouvert au président Hamel d’une envie, celle de « replonger ».
Le départ de Francis Gillot acquis, le président du RC Lens a immédiatement couché le nom du technicien bourguignon en bonne place sur sa liste. Après avoir annoncé partir en quête d’un coach d’expérience, libre de tout contrat et à même de faire passer un cap à Lens, Martel a été tenté de faire évoluer le profil. Frédéric Hantz et Jean-Pierre Papin (dont la possible venue dans l’Artois a fortement inquiété l’environnement du club) ont été sondés. De même qu’un Didier Deschamps à l’écoute mais désireux de se donner le temps d’effectuer le bon choix. « Le numéro un, sur toutes les listes que j’avais, c’était lui. (Ironique) Son début de carrière à Auxerre est extrêmement performant et respectable. J’ai senti dans les propos de Guy qu’il y avait peut-être une ouverture, ce qui ne m’a pas empêché de voir d’autres entraîneurs. On a commencé à discuter et je me suis aperçu qu’il était en pleine possession de ses moyens. Notre première conversation s’est terminée à 3h du matin ! » explique Martel, concurrencé sur le dossier par Monaco et Bordeaux, dont la proposition financière était égale à celle du Racing. Il y a huit jours, la signature pour deux saisons de Roux était acquise. Il ne restait plus qu’à éteindre les portables et à résister le plus longtemps possible au raz-de-marée médiatique. Du côté des supporters, le choix présidentiel est fortement apprécié.

Quelles sont ses premières décisions ?
Initialement programmé le mercredi 27 juin, le retour de vacances des joueurs a été fixé deux jours plus tôt. « Une semaine commence le lundi, avance Guy Roux, qui souhaite que la reprise de la réserve soit avancée d’une semaine. Les jeunes doivent pousser les professionnels en voulant prendre leur place. » Concrètement, le stage de préparation n’aura pas lieu à Vichy mais en altitude, en Suisse. De même, l’horaire des entraînements est modifié et les noctambules que peut compter l’effectif nordiste en seront pour leurs frais. Les joueurs auront ainsi rendez-vous à La Gaillette chaque matin à 8h pour un début de séance à 8h30. Enfin, cet hiver, l’ancien Icaunais, qui a déjà pris des renseignements sur Vimy et son bois, devrait emmener ses troupes du côté de Soulac (Gironde). Une habitude prise de longue date à Auxerre.

Quelle sera la composition du staff technique ?
En théorie, Guy Roux s’appuiera sur le staff sportif et médical déjà en place. Même chose en ce qui concerne la cellule recrutement, dont fait notamment partie Didier Sénac. En interne, les intéressés semblent sereins. « J’entre dans une famille très unie, chaleureuse. Je ne vais pas arriver avec un staff technique à plaquer dans le club. Je vais travailler avec une partie des gens d’ici. S’il faut apporter un complément, je demanderai au club de le faire. » Alors que le nom de son ancien adjoint, Alain Fiard, actuellement superviseur au LOSC, a été murmuré à tort comme possible renfort, Roux devrait demander à Daniel Krawczyk, Colbert Marlot et Jean-Pierre Lauricella de rempiler. Le travail accompli pendant deux ans et demi aux côtés de Francis Gillot parle pour eux. Et comme Roux compte s’appuyer sur des Lensois, on les voit mal emportés par la vague du changement. D’ailleurs, si l’on excepte Georges Tournay et Marc Westerloppe, tous deux en charge de la formation et titulaires du précieux Diplôme d’Entraîneur Professionnel de Football (voir ci-dessous), personne d’autre ne possède, à La Gaillette, l’expérience du haut niveau auprès d’un groupe professionnel.

Guy Roux a-t-il le droit d’entraîner ?
Non, explique le syndicat des entraîneurs. « Guy Roux n’a pas le droit de signer un contrat d’entraîneur à Lens. Il a plus de 65 ans (ndlr : 68), fulmine Pierre Repellini, membre du comité directeur de l’UNECATEF. On s’en tient à la défense de la profession. C’est dans le statut des éducateurs… L’âge limite pour l’exercice de la profession d’éducateur de football est fixé à 65 ans. Ou alors, on change les textes. Guy Roux a été président des entraîneurs pendant quelques années. Il connaît le problème. Cependant, il peut signer un contrat de manageur sportif, c’est son droit. » A La Gaillette, la réponse de l’intéressé fuse : « En France, vous avez le droit de travailler à partir de l’âge de 16 ans et il n’y a pas de limite supérieure. Il y a même un texte qui dit que quiconque voudrait introduire dans une convention collective une disposition allant à l’encontre des dispositions légales serait passible du pénal ! J’espère que mon contrat sera homologué normalement à la LFP ou après une passe d’armes devant les commissions de la Fédération. Le problème s’est déjà posé à Auxerre. J’ai fait appel et la commission avait enregistré mon contrat. C’est déjà une jurisprudence. » Si tel n’était pas le cas, Roux signerait un contrat de travail classique et le Racing inscrirait les noms de Georges Tournay ou de Marc Westerloppe sur les feuilles de match. Bref, pas de quoi fouetter un chat.

Quelles conséquences sur le recrutement ?
Le cas de l’entraîneur soldé, Gervais Martel et les dirigeants artésiens vont pouvoir enclencher la seconde en matière de recrutement. A ce niveau, le nouvel entraîneur lensois ne souhaite pas bouleverser en profondeur un effectif qu’il juge avoir fait ses preuves, malgré un final brutal. « Je pars du principe qu’il y a une bonne équipe à Lens, qu’il ne faut pas la toucher mais la retoucher, confie Roux, qui devrait clairement imposer sa griffe en matière de recrutement. J’ai vu le très bon Lens de cet hiver, qui enchaînait les victoires et le Lens en difficulté du match contre Nice, par exemple. J’ai vu beaucoup de qualités, c’est sûr. » Comme nous vous l’indiquions déjà la semaine dernière, les besoins ne vont guère évoluer : un gardien de but, des latéraux en défense ou au milieu, à gauche et à droite, un milieu récupérateur afin de pallier le départ de Seydou Keita et un voire deux attaquants. Logiquement, la filière auxerroise pourrait être activée. En fin de contrat à l’AJA, Lionel Mathis pourrait intéresser le Racing, tout comme Kanga Akalé. En quête d’un nouveau challenge, l’Ivoirien est également pisté par Marseille et Toulouse. Dans l’Artois, il retrouverait son compatriote Aruna Dindane. « En dessous de vingt-cinq joueurs - avec les trois gardiens - capables de jouer en équipe première, vous êtes en danger, ajoute Roux, avant de conclure : J’ai demandé à ce que l’on garde beaucoup de joueurs de cette année. Lens a de grosses fondations, y compris dans l’équipe. Les clubs qui disputent des finales sont ceux qui gardent huit, neuf joueurs chaque année. »
Alors que le nombre de matche disputés en 2006-07 par Eric Carrière a permis à l’ancien Nantais de voir son bail dans l’Artois automatiquement prolongé d’une saison (la fin de son contrat est désormais prévue pour juin 2008), la porte est ouverte pour Charles Itandje, Daniel Cousin, Grégory Vignal voire Sidi Keita. Sans parler de Seïd Khiter ou de Jonathan Lacourt, de retour de prêts d’Ajaccio et de Troyes. En tout cas, avec Roux, Lens s’est doté d’un découvreur de talents doublé d’un formateur hors pair. De quoi réjouir les éducateurs du centre de formation ou les joueurs et entraîneurs (Christophe Gardié-Eric Sikora) de la réserve.

Quid de Francis Gillot ?
Le successeur de Joël Muller a déjà repoussé des offres émanant d’au moins deux clubs. Gervais Martel, à qui l’on a même prêté l’intention de faire revenir Francis Gillot sur sa décision, souhaite garder l’ancien défenseur sang et or au club, dans des fonctions restant à définir. Les deux parties n’ont pas encore eu le temps d’échanger, et pour cause au regard de l’emploi du temps démentiel du président lensois. Ce sera chose faite dans les jours qui viennent. En attendant, Guy Roux avait prévu de rencontrer son prédécesseur vendredi dernier, histoire d’en savoir plus sur l’effectif. Pour le reste, tout se passera en douceur entre Gillot, guère intéressé par un retour à la formation, et son président. Leur amitié est indéfectible.

Hervé MICHEL, correspondant à Lens